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« Un partenariat bénéfique avec les écoles techniques »

Date de publication: 26 sept. 2015
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Asco est, avec Sonaca, Sabca et Techspace Aero, un des fleurons de l’aéronautique en Belgique. Le point sur ses perspectives avec Christian Boas, le CEO de cette entreprise qui se distingue entre autres par son ancrage familial.

Détenant dans sa spécialité quelque 95 % du marché à  l’échelle mondiale, Asco surfe sur un secteur en forte croissance. Sans éprouver trop de difficulté pour recruter, en particulier les ouvriers qualifiés qu’elle forme en partenariat avec des écoles depuis une quinzaine d’années.

Quelles sont les spécialités d’Asco ?

On peut considérer les avions, et l’industrie aéronautique au sens large, comme un immense puzzle dans lequel chaque entreprise a sa spécialité. La nôtre est double: nous concevons et produisons les mécanismes qui actionnent les parties mobiles des ailes – un marché dont nous détenons 95 % à  l’échelle mondiale –, et nous nous sommes aussi spécialisés dans les composants complexes à  base de titane et d’aluminium, qui sont notamment intégrés dans les trains d’atterrissage. Nous comptons parmi nos clients tous les grands acteurs comme Airbus, Boeing, Bombardier, Dassault ou Embraer par exemple.

On dit le marché aéronautique particulièrement bien orienté. Partagez-vous cette vision ?

Les carnets de commandes sont effectivement bien remplis, puisqu’ils sont estimés à  plus de huit années de travail, et les prévisions font état d’un besoin de plus de 30.000 avions de plus de cent places à  construire dans les vingt ans à  venir. Cela se justifie d’une part par la demande croissante de déplacements, non seulement en Europe et aux États-Unis, mais aussi et surtout en Asie et en Amérique latine. Et d’autre part par la nécessité de remplacer de nombreux avions qui arrivent progressivement en fin de vie. Ceci étant, il s’agit aussi d’un secteur cyclique, parfois soumis à  de fortes turbulences…

Vu votre leadership, quels sont les risques auxquels vous êtes exposés ?

Le premier concerne notre compétitivité : depuis le lancement de l’Airbus A320 au milieu des années 80, nous en sommes à  la cinquième révision du programme de fabrication, qui s’est à  chaque fois accompagné par de nouvelles contraintes en termes de coûts. Nous devons donc continuer à  nous améliorer de manière significative. Par ailleurs, même si nos compétiteurs sont peu nombreux et si les barrières à  l’entrée, technologiques notamment, sont élevées, nous devons toujours nous poser cette question fondamentale: pourquoi un client qui assemble des avions à  10.000 kilomètres de chez nous continuerait-il à  faire appel à  nous ?

Cette interrogation est valable aussi pour vos sous-traitants…

En effet, et je dis souvent à  ce sujet que le low cost n’est pas une notion géographique. Si mon sous-traitant belge est bien organisé, fiable et délivre une excellente qualité, il peut être plus compétitif qu’un concurrent bénéficiant d’une main-d’œuvre moins coûteuse. Cet avantage de la proximité joue aussi sur le plan du transport : celui-ci est coûteux, et engendre des pertes de flexibilité.

Quelles sont vos perspectives à  court terme ?

Certains programmes montent en puissance, comme l’Airbus A350 par exemple, ou le nouvel Embraer, et les cadences de production continuent d’augmenter pour les best-sellers que sont l’Airbus A320 et le Boeing 737 dont les nouvelles versions se vendent très bien. Parallèlement, certains programmes ralentissent comme l’A330 ou l’A380 par exemple. Au final, nous anticipons une croissance de 10 % de notre chiffre d’affaires pendant les trois prochaines années.

Qu’en est-il au niveau du recrutement ?

Après une période de forte croissance, nous sommes en phase de stabilisation. Mais cela ne signifie pas que nos portes sont fermées. Compte tenu des départs naturels et du turnover, nous recrutons une cinquantaine de nouveaux collaborateurs chaque année. De manière générale, les gens se plaisent chez nous: j’ai eu l’occasion de récompenser à  la dernière Saint-Eloi un travailleur qui avait démarré sa carrière chez Asco il y a 45 ans !

De nombreux profils techniques sont en tension. Qu’en est-il chez vous ?

Nous avons mis en place il y a plus de quinze ans déjà  des collaborations avec des écoles techniques à  Bruxelles et en Flandre, par le biais desquelles les étudiants viennent suivre des cours au sein de notre centre de formation. Tout le monde y gagne: les élèves et leurs enseignants bénéficient d’un matériel de pointe, que nous utilisons pour nos formations en interne, et nous pouvons repérer les jeunes les plus motivés. Autrement dit, nous avons réglé le problème de la pénurie d’ouvriers qualifiés à  la source ! De telles collaborations fonctionnent bien en Allemagne, mais aussi aux États-Unis. Nous y travaillons par exemple avec le Meridian Technology Center, en Oklahoma, qui agit de manière pragmatique: il examine les besoins des employeurs et développe les formations…

Qu’en est-il des profils plus qualifiés ? De type techniciens ou ingénieurs par exemple ?

Nous recrutons dans le commercial, le financier, la logistique, les achats, mais aussi bien évidemment dans la sphère purement technique : agents de méthodes, programmeurs, ingénieurs en production ou en bureau d’études, designers, etc. Un problème réside dans le fait que nos universités ne délivrent pas suffisamment de diplômes spécialisés en aéronautique. Et qu’il est aussi très compliqué de trouver des gens qui sont à  la fois bons en technique et en management.

Êtes-vous présent sur les campus ?

Nous nous y manifestons de manière plus active. Mais nous ne recrutons pas que des juniors : nous avons aussi besoin de profils expérimentés qui ont acquis de la bouteille par ailleurs. Ils viennent parfois d’entreprises actives dans notre secteur, de leur propre initiative : nous n’allons pas débaucher chez nos collègues, pas plus qu’ils ne le font chez nous, dans le cadre d’une forme de gentleman’s agreement.

Asco est notamment implantée à  Zaventem. La Wallonie est-elle un bassin de compétences ?

Nos collaborateurs viennent de Flandre, de Bruxelles et bien évidemment de Wallonie. La langue n’est pas un sujet chez nous où la courtoisie prévaut et où, du reste, la langue de travail est surtout l’anglais comme dans tout le secteur aéronautique.

Quelles sont les valeurs auxquelles il faut adhérer pour espérer vous séduire ?

Je suis très attaché l’esprit d’équipe: une entreprise, ce sont avant tout des femmes et des hommes qui travaillent ensemble, dont chaque tâche est importante, et qui regardent dans la même direction. Un tempérament individualiste ne serait donc pas heureux chez nous. Nous sommes aussi très attachés à  l’esprit d’entreprendre. Nous évoluons certes dans un environnement très réglementé, où les procédures et les certifications sont très importantes, mais nous devons aussi constamment nous améliorer: nous apprécions donc les gens qui apportent des idées neuves et ont envie de les mettre en œuvre.

Quels sont les arguments qui vous permettent de convaincre un candidat ?

Asco est une entreprise internationale, de grande taille, qui pourtant est restée familiale dans tous les sens du terme. Nous sommes financièrement indépendants, ne sommes pas cotés en Bourse, ce qui nous permet de déployer une vraie stratégie de long terme. Nous sommes aussi une entreprise familiale au sens où nous privilégions cette culture d’entreprise et favorisons tout ce qui renforce les liens entre nos collaborateurs. Enfin, notre package salarial est dans la moyenne supérieure, nous investissons près de 4 % de nos frais de personnel dans la formation et nous sommes dans un secteur en pleine croissance: autant d’éléments qui peuvent justifier qu’on souhaite construire sa carrière chez nous !

Benoît July