L'alternance, cet autre passeport pour l'emploi
Plébiscitée en Allemagne, la formation en alternance reste perçue comme un complément, voire une roue de secours chez nous. Ses acteurs l'affirment pourtant : en prise directe avec les entreprises, elle constitue une voie royale vers l'emploi.
De nombreux regards belges se sont tournés vers l'Allemagne, ces 12 et 13 mars, à l'occasion de la visite de travail effectuée par le roi Philippe à Berlin et à Dà¼sseldorf. Accompagné d'une large délégation de ministres, mais aussi de professionnels, le Roi poursuivait l'objectif d'étudier le modèle allemand de formation en alternance, largement plébiscité chez nos voisins et dès lors source d'inspiration dans notre pays.
De quoi s'agit-il ? D'une forme de collaboration qui renforce les liens entre les mondes de l'enseignement et de la formation et celui de l'entreprise, les étudiants étant amenés à consacrer une partie de leur apprentissage sur le terrain et à y glaner une expérience directement valorisable sur le marché de l'emploi. Les entreprises sont, à l'évidence, en demande : le système leur permet non seulement d'aider les jeunes à mieux se former, mais aussi de prendre le temps de les tester en vue d'une éventuelle embauche. Elles y gagnent en parallèle, dans certains métiers en pénurie, l'assurance de pouvoir disposer des compétences requises pour la poursuite de leur activité.
L'un des exemples les plus fréquemment cités en la matière – qui a d'ailleurs fait lui aussi l'objet d'une visite royale – est celui d'Audi Brussels. Le constructeur... allemand s'est tourné en 2012 vers deux écoles secondaires, l'Institut Don Bosco de Woluwe-Saint-Pierre et l'école KTA de Hal pour lancer un projet pilote. Des élèves de 5e et 6e, qui y suivent une formation d'électricien automaticien, passent depuis lors plusieurs semaines sur l'année chez Audi, à la fois pour y recevoir une formation complémentaire et y effectuer un stage en production, au sein de l'usine d'assemblage. À l'issue de la 6e, l'élève peut commencer à travailler chez Audi ou se lancer dans une année complémentaire, au cours de laquelle il passera quatre jours par semaine chez le constructeur et un jour à l'école.
Quelques dizaines d'élèves ont déjà bénéficié de cette forme d'immersion, dont le bilan est apparemment très positif. En septembre 2012, nous avons débuté avec 12 élèves, dont 11 ont réussi la formation : 4 ont commencé à travailler chez nous, 5 effectuent une 7e année et un autre s'est inscrit en études supérieures en informatique, en restant en lien avec nous, commente Wannes Schoeters, responsable de ce programme chez Audi. Et ce, alors que le succès est au rendez-vous également dans les écoles partenaires dont les options font le plein : l'espoir d'un emploi chez le constructeur allemand fait manifestement saliver.
Mais la formation en alternance ne se limite évidemment pas à cette seule expérience. Rien qu'à l'IFAPME, un acteur incontournable dans ce domaine en Wallonie, ce sont environ 8 000 personnes qui sont en formation selon un principe comparable : une partie du temps sur les bancs de l'école, l'autre partie chez un employeur dans l'horeca, la menuiserie ou encore dans l'immobilier par exemple. Les motivations sont diverses, souvent positives même si, on ne peut pas l'éluder, elles tiennent aussi parfois pour certains jeunes encore en âge de scolarité de la roue de secours (une image que les acteurs de la formation en alternance souhaitent relativiser comme on le lira en page 3).
Mon parcours est un peu chaotique, reconnaît Maxime, actuellement en formation en peinture à Namur. J'avais commencé par étudier la coiffure à l'institut Saint-Joseph à Jambes, mais les cours ne me plaisaient pas, il y avait trop de théorie, et j'ai raté ma 4e. Je me suis ensuite tourné vers l'IFAPME pour retenter la coiffure avant de finalement découvrir la peinture. Je travaille maintenant trois jours par semaine chez un patron qui continue à me former. Et je suis désormais certain de mon choix.
Benoît July