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Les ailes du désir

Date de publication: 16 juin 2015
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Présents en force au Salon du Bourget, les industriels wallons de l'aéronautique planent sur une conjoncture positive. Et séduisent de nombreux candidats... qui n'affichent pourtant pas toujours les compétences recherchées.

Près d'une cinquantaine d'exposants wallons ont répondu présent cette année au Salon du Bourget, ce grand rendez-vous de l'aéronautique mondiale qui se déroule tous les deux ans à  proximité de Paris. Parmi ces exposants, les fleurons du secteur aérospatial comme Techspace Aero, Sonaca, Thales Alenia Space et autres Sabca, mais aussi de nombreuses PME qui parfois sont totalement spécialisées dans ce créneau, mais y voient aussi une source bienvenue de diversification de leurs activités.

Le secteur, il faut le rappeler, plane sur une conjoncture positive. Pour 2015, l'Iata (Association internationale du transport aérien) prévoit une hausse de passagers de 7 %, encore supérieure à  la croissance moyenne pourtant déjà  élevée des dernières années. Pour répondre à  cet accroissement de la demande, mais aussi au besoin de renouveler des flottes parfois vieillissantes au profit d'appareils plus économes et plus performants, plus de 35 000 avions devront être produits dans les vingt prochaines années : les carnets de commandes d'Airbus et de Boeing sont déjà  remplis pour... dix ans.

Les industriels belges en bénéficient allègrement, puisqu'ils sont fournisseurs de longue date d'Airbus mais aussi, pour certains, d'autres constructeurs comme Bombardier (Canada) ou Embraer (Brésil). Les chiffres sont à  l'avenant : les entreprises membres du pôle de compétitivité Skywin emploient directement quelque 6 500 personnes et déploient un chiffre d'affaires de l'ordre 1,5 milliard d'euros (y compris les 250 millions générés par le secteur spatial). Les investissements, au sein de ce pôle qui regroupe 131 membres dont 92 PME, ont crû de 25 % depuis 2006.

Pareil contexte a bien évidemment influencé le marché de l'emploi : les candidatures abondent... mais ne correspondent pas toujours aux exigences, très élevées il est vrai, des entreprises comme en témoigne par exemple Jean-Marie Lefèvre, le patron de la Sabca dont on lira l'interview en page 2. Le nœud du problème se situe en réalité... à  sa base : les écoles ne forment pas assez de diplômés disposant des compétences techniques requises pour espérer décrocher un job dans de secteur à  haute intensité technologique. Autrement dit : si l'attractivité pour les entreprises du secteur est réelle, celle des études qui permettraient d'y travailler est bien moindre...

Des besoins de compétences nouvelles

Vu l'ampleur et l'urgence du défi, car les cadences de production augmentent, les entreprises déploient des efforts de formation en interne ou en partenariat avec des acteurs extérieurs comme le Wallonia Aerotraining Network (WAN) qui en profitent, parallèlement, pour former des demandeurs d'emploi. Mais l'enjeu est encore plus large, commente Étienne Pourbaix, à  la tête du pôle Skywin. Nos entreprises sont non seulement soumises à  cette pénurie quantitative de personnel qualifié, mais aussi à  des besoins de compétences nouvelles qui sont liées soit aux technologies qu'elles développent, soit aux exigences de marché auxquelles elles sont confrontées : la pression exercée sur les coûts par les constructeurs, en particulier, est énorme et oblige à  déployer des efforts considérables pour continuer à  engranger des gains de productivité.

Dans ce contexte, il apparaît que le besoin de formation ne touche pas seulement les opérateurs, qui doivent se former à  de nouvelles techniques, mais aussi le personnel d'encadrement. C'est dans ce contexte qu'a été labellisé un projet baptisé « Campuss », initié par des rencontres avec plus d'une vingtaine d'industriels du secteur. Un millier de collaborateurs, et une soixantaine de demandeurs d'emploi, devraient bénéficier de ce vaste programme de formation sur une période de quatre ans.

Trois axes ont été déterminés, précise Étienne Pourbaix. Le premier est dédié à  la simulation numérique, par le biais de formations devant aider à  la conception de structures ou d'équipements. Le second est dédié aux méthodes, aux procédés et à  la qualité, et se déclinera en formations visant à  améliorer l'industrialisation, notamment sur le plan de qualité, des délais et de la compétitivité. Le troisième axe, enfin, est dédié aux soft skills : en sus de la maîtrise des compétences techniques au sens strict apparaît en effet de plus en plus, notamment dans le chef des ingénieurs, le besoin de maîtriser des compétences plus transversales comme la communication, la gestion de projet ou encore la créativité.

Benoît July