Les cinq clés d'un salaire attractif

3 261 €. Tel est le salaire brut moyen en Belgique selon notre vaste enquête salariale menée avec la KU Leuven auprès de 33 000 travailleurs en Belgique. Un salaire brut dont l'équivalent en net peut être évalué aux alentours de 2 000 €. Références lève le voile en exclusivité, chiffres, tableaux et analyses à  la clé, sur les déterminants d'un salaire attractif aujourd'hui.

Découvrez aussi le nouveau Compas des salaires 2014 !

Tous les deux ans depuis 1998, Références décortique grâce à  l'équipe du professeur Luc Sels, de la KU Leuven, le salaire des travailleurs belges. En deux ans, ceux-ci ont progressé, en moyenne et en brut, de 4,09 % - la hausse précédente, en deux ans, était de 4,2 %. Les données issues de cette enquête constituent un réservoir d'infos dont nous continuerons de décliner les enseignements dans nos prochaines éditions, mais aussi en ligne, par le biais de notre nouveau Compas des Salaires, un outil exclusif qui vous permet d'anticiper, en fonction de votre profil, le salaire mensuel et les avantages extralégaux dont vous pouvez bénéficier.

Gilles Klass, vous êtes notre consultant en matière salariale (*). La progression des salaires en Belgique reste globalement limitée. Pourquoi ?

En moyenne, la hausse sur deux ans est en effet de l'ordre de 4 %. Cela correspond grosso modo à  l'augmentation salariale liée à  l'indexation. C'est d'ailleurs comme cela que les travailleurs interrogés justifient en règle générale leur augmentation : ils évoquent spontanément l'indexation, mais aussi l'ancienneté. À défaut de changer d'employeur, ce qui constitue souvent le meilleur moyen de bénéficier d'une augmentation, ou à  défaut d'obtenir une promotion, il faut donc être bien conscient que les choix qu'on pose, parfois très tôt dans la vie, vont fortement déterminer le niveau de salaire auquel on pourra prétendre par la suite.

Le premier déterminant d'un « bon salaire » reste le diplôme, de préférence universitaire. Faut-il cependant nuancer ?

La prime au diplôme universitaire est effectivement importante, de l'ordre de 29 %. Mais derrière ce constat global se cache une très grande disparité. Les rémunérations de certains diplômes universitaires sont en effet très faibles, et parfois inférieures à  celles d'un diplôme non universitaire. Il s'agit là  d'un des grands enseignements de cette enquête, qui met le doigt là  où cela fait mal : la course au diplôme universitaire à  tout prix n'est pas toujours justifiée, du moins si on l'évalue sur le strict plan salarial. Les universités devraient être plus transparentes à  ce propos : bravo si vous choisissez la psychologie, la criminologie ou l'archéologie par exemple, qui sont des études évidemment très intéressantes, mais sachez que ce choix ne sera pas exempt de conséquences salariales. Et que ces conséquences, vous devrez probablement les assumer pendant toute votre vie professionnelle.

Les différences sectorielles sont, elles aussi, particulièrement importantes : la chimie et la pharmacie caracolent en tête du classement...

Entre le secteur pharmaceutique et le tourisme, le différentiel, en moyenne, est de l'ordre de 31 %. C'est bien évidemment énorme et c'est conforme au marché. La différence est d'autant plus importante quand on sait que ces secteurs qui rémunèrent le mieux, comme aussi dans une moindre mesure les banques et assurances, l'énergie, les télécoms entre autres, sont aussi souvent plus généreux en termes de jours de congé et d'avantages extralégaux. De telles différences se justifient de manière historique, en particulier pour la chimie et la pharma qui ont longtemps dégagé des marges très importantes et pouvaient se permettre de rémunérer généreusement pour attirer les meilleurs talents. Je ne suis pas certain cependant qu'à  l'heure actuelle, ces entreprises, qui sont fortement exposées à  la concurrence internationale, se réjouissent de ce classement. D'année en année, le différentiel tend d'ailleurs à  diminuer.

La taille de l'entreprise, voire sa nationalité, influence aussi la rémunération. L'avantage penche clairement en faveur de la grande multinationale…

Il ne faudrait pas inférer de ce constat qu'on est « mal payé » dans les PME. Certaines d'entre elles parviennent à  s'aligner et ont de toute façon d'autres atouts à  proposer. Mais, en moyenne, les salaires sont plus élevés dans les grandes entreprises : de l'ordre de 16 % entre l'entreprise de plus de 500 travailleurs par rapport à  celle qui emploie moins de 10 salariés. Parmi les grandes entreprises, il faut également opérer une distinction puisqu'il apparaît que les organisations étrangères rémunèrent sensiblement mieux que les belges : de l'ordre de 10,7 % pour une entreprise américaine par exemple. Enfin, par rapport à  la moyenne nationale, les entreprises implantées à  Bruxelles paient des salaires plus élevés de l'ordre de 5,56 %. Tout cela est assez cohérent : Bruxelles est le siège de nombreuses multinationales d'origine étrangère, qui y emploient du personnel souvent très qualifié et exerçant des responsabilités importantes. Avec un avantage salarial significatif à  la clé.

Les avantages extralégaux constituent une partie importante, et souvent croissante, du salaire. Pourquoi ?

C'est lié à  la fiscalité sur le travail, qui oblige les employeurs à  faire preuve de créativité. Le résultat, c'est qu'il devient très difficile, voire impossible, de recruter aujourd'hui si on n'offre pas une assurance groupe, une assurance hospitalisation, des chèques-repas, des indemnités forfaitaires ou, pour certaines fonctions (tout de même 20 % des salariés) une voiture de société. Ce qui est frappant, c'est que ces avantages sont en croissance chaque année. La conséquence, à  laquelle on ne prête peut-être pas suffisamment attention, c'est qu'on évolue vers un modèle de société où c'est l'entreprise qui prend financièrement en charge, de manière substantielle et croissante, des pans entiers de la vie des salariés : leurs déplacements, leurs hospitalisations, leurs pensions.

La partie variable du salaire, enfin, est-elle aussi globalement en croissance. Pourquoi ?

Un tiers des salariés déclarent qu'une partie de leurs revenus est variable, liée à  divers critères comme leur performance individuelle ou celle de l'entreprise. On évolue en effet vers un système où la compétence et la performance constitueront des éléments de plus en plus déterminants de la rémunération, au détriment de critères tels que les fameux barèmes ou l'ancienneté. Il s'agit à  mes yeux d'une tendance lourde, inéluctable, car liée à  la compétition internationale : le nombre de salariés concernés va continuer à  croître et, surtout, la partie variable de leur salaire, limitée en moyenne à  11 % pour l'instant, va vraisemblablement elle aussi augmenter.

Benoît July

(*) Gilles Klass est consultant indépendant. Il collabore entre autres avec Mercuri Urval depuis 1995, désormais en tant qu'Executive Advisor.

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