Xylowatt est prête à remettre les gaz
Après une période de fortes turbulences, l'entreprise spécialisée dans la production de gaz propre au départ de biomasse et de déchets est prête à redécoller. En s'appuyant sur un mix de compétences jeunes et expérimentées.
Spin-off de l'UCL constituée il y a plus de dix ans, Xylowatt ne s'est pas encore transformée en success-story. Fortement recapitalisée conjointement à l'arrivée de poids lourds industriels (Air liquide et CMI) dans son actionnariat, l'entreprise qui a déménagé de Charleroi à Louvain-la-Neuve a changé de business model tout en conservant sa mission : aider les entreprises et les collectivités à accéder à une énergie plus durable. Le point avec Olivier Lefebvre, son CEO, qui estime l'entreprise désormais outillée pour aborder une nouvelle étape, sans doute décisive.
Xylowatt, une entreprise verte ?
Une entreprise qui a été constituée en 2001 sur une bonne idée : la gazéification des déchets de bois, et dont la mission n'a pas fondamentalement changé depuis lors, même si la technologie a évolué. Notre proposition est simple : aider les entreprises et collectivités à convertir un problème de déchets en solution par le biais de la production de gaz propre. Nous nous inscrivons donc en effet dans une optique de développement durable.
Plus de dix ans après sa création, l'entreprise est dans le rouge. Comment expliquer ce parcours ?
De multiples facteurs doivent être pris en compte, parmi lesquels le fait que la technologie a beaucoup évolué, mais aussi le fait que nous travaillons sur des projets industriels de longue haleine. On parle de génération d'énergie, de clients industriels, de cycles longs tant sur le plan commercial que sur celui de la mise en œuvre : nous sommes à mille lieues de l'univers des startups qui développent des applications pour le Net ! Il y a trois ans, l'entreprise s'est retrouvée à la croisée des chemins : la technologie (baptisée Notar, NDLR) était au point, mais la solution n'était pas aboutie sur le plan industriel. Nous avons fait le choix de changer de business model en abandonnant l'activité d'assemblage pour nous concentrer sur notre core business : le process lui-même.
D'où le partenariat, signé en février 2014, avec Air Liquide et CMI ?
Effectivement. CMI, spécialisé notamment dans la conception d'équipements dans le domaine de l'énergie, complète son offre en la matière tout en nous apportant ses compétences en ingénierie et en industrialisation. Air Liquide, spécialisée notamment dans la commercialisation des molécules de gaz, entend proposer à ses clients industriels une source d'énergie renouvelable de qualité. En résumant très fort, le cycle idéal serait le suivant : Xylowatt développe la technologie et les équipements, CMI en effectue l'ingénierie, l'assemblage et la livraison, et Air Liquide opère l'installation délivrée au client. Cet accord, conjoint à une augmentation de capital de près de 6 millions d'euros effectuée en février 2014, nous procure donc une forte crédibilité et des bases solides pour nous relancer.
Comment s'est traduit ce repositionnement sur le plan des ressources humaines ?
L'activité d'assemblage, à Charleroi, a été clôturée et nous avons déménagé à Louvain-la-Neuve. Une quinzaine de personnes ont quitté l'entreprise, nous en avons depuis lors recruté une dizaine et nous sommes actuellement en quête de six profils. Le portefeuille de compétences a, dans la foulée, fortement évolué.
Quels sont, précisément, les profils critiques désormais ?
En sus des techniciens qui agissent sur les sites où sont exploitées nos installations, nos compétences-clés tournent autour de la R&D, visant à l'amélioration continue de notre technologie et de nos procédés : nous avons de belles réalisations, comme à Oiry en Champagne (France) par exemple, mais nous devons continuer à travailler sur l'optimisation des coûts de sorte que le gaz propre que nous produisons soit pleinement compétitif vis-à -vis du gaz d'origine fossile. Cela signifie : optimiser le process et travailler sur la qualité des déchets qui constituent notre matière première, entre autres. Nos autres compétences-clés sont de nature commerciale : nous devons convaincre de nouveaux clients parmi lesquels des industriels, des collectivités locales, y compris à la grande exportation. Le Japon par exemple, où l’énergie est devenue un enjeu majeur après Fukushima, peut être intéressé par nos solutions.
Nombre de profils que vous avez recrutés sont expérimentés. La raison ?
Cela se justifie par le fait que nous avions besoin de compétences capables de se greffer rapidement sur notre acquis tout en nous apportant le fruit de leur expérience. Nous avons donc recruté en quelques mois un responsable des opérations, un responsable pour notre bureau d'études et des commerciaux capables de nous faire franchir rapidement un nouveau cap. Nous pouvons aussi nous appuyer sur un excellent président du conseil d'administration en la personne de Pierre Mottet, qui a longtemps dirigé IBA et qui nous fait bénéficier de son expertise dans la commercialisation de projets à haute intensité capitalistique et technologique. Cela étant, nous sommes aussi intéressés par des profils plus jeunes, qui vont progresser avec nous.
Quels sont vos facteurs d'attractivité ?
Les collaborateurs qui nous rejoignent sont attirés par un double défi : technologique, mais aussi industriel. Xylowatt a traversé des turbulences, nous sommes transparents à ce sujet, et même s'ils se sont quelque peu éloignés, les risques n'ont pas disparu pour autant. Les jeunes, qui peuvent accepter ce risque, sont aussi et surtout attirés par notre mission qui consiste à œuvrer à un développement plus durable. En réalité, les plus expérimentés sont animés par des ressorts comparables : ils sont en recherche d'un job qui a du sens, qu'ils n'ont peut-être pas trouvé précédemment, et sont arrivés à un stade de leur parcours où ils peuvent à nouveau effectuer des choix plus risqués.
Quelles sont les qualités que vous recherchez ?
L'esprit entrepreneurial doit être présent de manière impérative. Nous sommes une petite structure au sein de laquelle chacun est amené à recevoir rapidement de grandes responsabilités et à agir en autonomie tout en restant bien évidemment connecté à l'équipe. S'agissant des profils technologiques, nous sommes très attentifs à la culture de la performance : nous devons impérativement rester connectés au marché, la technologie n'ayant de valeur que si elle nous permet de séduire de nouveaux clients !
Un dernier mot sur votre déménagement à Louvain-la-Neuve ?
Les ateliers de Charleroi étant condamnés, nous avons fait le choix de nous rapprocher de l'UCL, une université à laquelle nous sommes historiquement liés et avec laquelle nous continuons de collaborer. Le dynamisme de Louvain-la-Neuve et sa situation centrale en Belgique constituent aussi d'indéniables atouts pour attirer les profils que nous recherchons. Et ce, même si les exigences salariales sont sensiblement plus élevées dans le Brabant wallon...
Benoît July