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De nouveaux horizons pour les ingénieurs

Date de publication: 7 févr. 2014
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Les entreprises courent après l'ingénieur idéal. Mais ce profil très recherché privilégie les grands groupes pour faire carrière. Avec la mondialisation du marché des compétences, les plus férus lorgnent du côté des projets internationaux.

Il court, il court, le refrain de la pénurie d'ingénieurs. D'usines en colloques, de rapports en déclarations. Profil-clé pour l'économie, l'ingénieur reste la coqueluche des employeurs. Bureaux d'étude, industrie, énergie, transports, high-tech, numérique, banques... plus un secteur ne veut s'en passer. Et les embauches pleuvent, notamment parce que des « poids lourds » sont confrontés à  une vague importante de départs à  la retraite. Seulement, les DRH comme leurs consultants recherchent tous l'Ingénieur avec un « i » majuscule, le diplômé de grande école formé à  tout et même à  plus, le brillant esprit passé par les meilleurs stages, et de préférence avec une première expérience dans l'industrie. Et tant pis si, par la suite, ils font toute autre chose que de la production ou de l'ingénierie. Car les spécialistes du recrutement sont unanimes ou presque : un tiers des ingénieurs deviennent marketeurs, consultants en stratégie, DRH ou financiers, quand ils ne finissent pas fonctionnaires ou enseignants.

Or, depuis quelques années, la palette des métiers s'élargit. Et même s'ils ne sont pas toujours bien connus, de nouveaux horizons s'ouvrent aux ingénieurs. Le mirage de la finance s'efface. La technologie se répand partout, et de plus en plus de métiers ont besoin d'ingénieurs. Pour des postes de commerciaux ou de DRH, les entreprises préfèrent parfois ces profils techniques, explique Jacques van Vyve, président de la Fabi. Elles se sont rendu compte que, face à  un monde qui devient de plus en plus complexe, les ingénieurs sont les mieux placés pour concevoir des produits structurés, quels qu'ils soient. S'assumant davantage, l'ingénieur retournera-t-il travailler dans les métiers du chiffon gras ou de la high-tech ? Oui, mais de préférence ailleurs, sur d'autres continents. Ainsi, 40 % des élèves en écoles d’ingénieurs souhaitent commencer leur carrière à  l’étranger, selon une enquête du cabinet international de conseil en stratégie spécialisé dans l'aide au recrutement, Universum, menée en 2013. À l'échelle internationale, en matière d'expatriation, les Italiens sont les plus enclins à  partir à  l’étranger (46 %), suivis des Espagnols (42 %) devant les Français (40 %). En bas du classement se trouvent les étudiants chinois et japonais avec respectivement 13 %.

S'expatrier représente donc une opportunité à  ne pas négliger pour les jeunes ingénieurs. L'Europe, principalement, où l'on songe aux centrales thermiques du groupe GDF Suez en Allemagne et aux Pays-Bas. Et où un très gros marché se profile par ailleurs : le remaillage du réseau de distribution d’électricité, pour le relier aux nouvelles sources que sont l’éolien et le photovoltaïque. La Suisse recrute beaucoup dans l'électronique et le pharmaceutique, l'Allemagne, elle, recherche des profils variés en électronique, mécanique et mécatronique. C'est d'ailleurs le talon d'Achille de l'économie allemande. Avec le taux de natalité le plus faible d'Europe, ce pays manque de plus en plus de talents. Hays rapporte que le déficit serait de 764 000 ingénieurs pour l'industrie et de 38 000 pour les technologies de l'information. Les entreprises allemandes ont réagi en lançant des opérations spectaculaires pour recruter dans l'Espagne en crise. Pour les ressortissants de pays non européens, le gouvernement allemand a assoupli les critères. Le montant du salaire annuel nécessaire pour venir travailler a été abaissé de 65 000 € à  44 000 €.

L’Afrique aussi s’ouvre aujourd’hui largement, grâce à  de nouveaux financements, ainsi que les États-Unis. De nombreux Belges rejoignent aussi des entreprises minières au Canada, qui les envoient ensuite sur des chantiers partout dans le monde. On retrouve également pas mal d'ingénieurs au Moyen-Orient, où des partenariats d'écoles et d'universités se nouent au Qatar et à  Dubaï, qui sont autant de relais sur place. Et enfin en Asie... Tractebel Engineering, qui emploie quelque 1 300 personnes en Belgique, dont 900 au siège bruxellois, a récemment décroché son premier grand contrat chinois, qui porte sur l’extension d’un terminal gazier à  Shanghai. L'expatriation peut permettre aussi de réaliser un bond salarial. Ainsi, la Suisse offre des salaires très intéressants, jusqu'au double des rémunérations belges en début de carrière. Les Pays-Bas, l'Allemagne ou encore l'Autriche proposent des salaires d'environ 20 % supérieurs. L'Italie, l'Espagne, l'Angleterre sont en revanche moins avantageuses sur ce plan.

Les ingénieurs experts sont très « bankable »

Les ingénieurs résistent à  la crise. Mais tous les métiers ne sont pas logés à  la même enseigne. Premier constat : les métiers liés à  la recherche restent très porteurs. Cela vaut aussi bien pour les jeunes diplômés que pour les profils plus expérimentés. L'intérêt des employeurs s'est même accentué. Pour la majorité des groupes industriels, délocaliser la matière grise dans les pays low cost n'est pas une solution. En Belgique, les experts en recherche et bureau d'études font l'objet de toutes les attentions. Ils peuvent prétendre à  des rémunérations attractives, explique Wilfrid de Brouwer, Managing Director de Hays Belgique. Les groupes liés aux transports, à  l'énergie et à  l'aéronautique les embauchent en priorité. Les jeunes diplômés ou les profils juniors sont les premiers concernés par ces postes d'ingénieurs en développement mécanique ou ingénieurs matériaux et procédés, témoigne un responsable relation campus. Dans les services d'ingénierie-conseil, l'électrique, l'électronique, l'électrotechnique sont les domaines les plus friands en ingénieurs pour les activités du ferroviaire, du smart grid et maintenant de l'éolien offshore.

Bien qu'ils représentent des volumes de recrutement plus modestes, d'autres métiers pointus offrent de véritables opportunités. C'est le cas des secteurs de la qualité, hygiène, sécurité, environnement (QHSE) qui, sous la pression de réglementations plus contraignantes, intègrent de plus en plus des compétences de haut niveau. Beaucoup d'ingénieurs diplômés s'orienteraient vers ces fonctions jusqu'à  présent occupées par des techniciens ayant évolué dans l'entreprise.

D'une manière générale, l'expertise, que ce soit en mécanique, électrotechnique, optronique ou électronique de puissance, est toujours très recherchée. C'est le retour en force des experts, affirme Antoine Biot, directeur du cabinet Robert Walters Belgique. Dans les secteurs de l'aéronautique et de l'énergie notamment, la demande en ingénieurs spécialisés reste soutenue. Ces profils sont si convoités que les besoins des entreprises sur certains profils, notamment dans l'ingénierie industrielle ou l'énergie, débouchent sur des hausses de rémunération assez sensibles. Leurs salaires, entre 50 000 € et 150 000 € par an, ont tendance à  rattraper ceux des managers, précise Antoine Biot.

Parmi la grande diversité des métiers d'ingénieurs, quelques fonctions tirent mieux que d'autres leur épingle du jeu. Depuis 2008, les sociétés industrielles ont fonctionné avec des effectifs en baisse. Aujourd'hui, elles se renforcent sur certains profils : la maintenance faisait par exemple figure de parent pauvre de l'industrie. C'est désormais une fonction essentielle pour des questions d'assurances et de risques, explique Antoine Biot. Les niveaux de rémunération pour cette fonction oscilleront cette année entre 51 000 € et 100 000 € selon l'ancienneté. Autres fonctions en croissance, liées à  la bonne tenue de l'ingénierie industrielle et au nombre de nouveaux projets d'installation dans le monde, les chefs de projet voient leur rémunération évoluer à  la hausse, indique le directeur de Robert Walters, avec une montée en force des parts variables pouvant atteindre 20 % de la rémunération généralement indexée sur la réussite du projet.

Quant aux chargés d'affaires, ils se font rares et sont donc chers. Les niveaux de salaire deviennent équivalents à  une fourchette de 52 000 € à  60 000 €, ajoute-t-il, pour un profil ayant de 3 à  6 ans d'expérience. Tout ce qui tourne autour de la supply chain prend aussi de l'importance et les directeurs intègrent assez régulièrement aujourd'hui les comités exécutifs, souligne-t-il, en précisant que les rémunérations d'un directeur supply chain tournera cette année autour de 65 000 € à  85 000 € (pour une expérience de 7 à  10 ans) et de 85 000 à  130 000 € brut (avec plus de 10 ans d'ancienneté).

 

3 carrières pour voyager

INGÉNIEUR MINIER

Avec les investissements gigantesques dans ce secteur, travailler à  la mine redevient à  la mode. Extraire les matières premières minérales et énergétiques qui font vivre toute l’industrie nécessite des compétences pointues. Les entreprises minières ont besoin d’ingénieurs afin d’étudier la faisabilité d’un nouveau chantier, d’optimiser les moyens de production, puis d’organiser le forage et l’extraction. L’ingénieur des mines travaille aussi sur le traitement des minerais. Pour exercer ces métiers, il faut être prêt à  voyager, aussi bien en Europe qu’à  l’international.

Qui recrute ? Umicore, Total, les grandes entreprises minières internationales.

 

INGÉNIEUR GÉOLOGUE

Analyser la composition des sols, leur structure et leurs propriétés physiques… L’ingénieur géologue étudie les constituants solides, liquides et gazeux de la terre, souvent par l’analyse informatique des sondages effectués dans le sol afin de déceler le potentiel du terrain. Il travaille tant avec les industries minières ou de l’énergie, afin de rechercher des gisements de minerais ou de ressources énergétiques (pétrole, gaz, uranium), qu’avec les spécialistes des ressources en eau, de la restauration de sites pollués ou de la construction de bâtiments et de grands travaux.

Qui recrute ? Tractebel, l’industrie minière en général, les collectivités locales, les bureaux d’études.

 

INGÉNIEUR EN GÉNIE URBAIN

Chef d’orchestre de la cité : c’est ainsi que se définit l’ingénieur en génie urbain. Il doit imaginer l’aménagement d’une ville, de ses infrastructures et de ses réseaux (eaux potables et usées, déchets, transports…), avec un souci de plus en plus grand de l’environnement. Il doit suivre des projets complexes en prenant en compte des aspects aussi bien techniques qu’administratifs ou financiers. Il peut, par exemple, développer des lignes de tramway, aménager des quartiers urbains, optimiser le réseau d’éclairage d’une ville ou gérer l’organisation d’un service de nettoyage.

Qui recrute ? Les collectivités locales, les bureaux d’études, les entreprises en construction.