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Infirmier, une spécialisation davantage qu'une vocation

Rédigé par: Charles-Henri Van Loosveldt (st.)
Date de publication: 15 mai 2023
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Malgré la baisse du nombre d’étudiants infirmiers et les difficultés de la profession, le rôle central du métier dans le personnel médical ainsi que ses aspects scientifiques et relationnels continuent d’attirer.
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Malgré les nombreuses épreuves auxquelles font face les infirmières et infirmiers, fortement mises en lumière pendant la pandémie de Covid, la profession continue d’attirer chaque année des centaines d’étudiants en Belgique. Pas loin d’un millier suivent actuellement le bachelier d’infirmier responsable de soins généraux à la Haute École Léonard de Vinci, dont près de 400 en première année.

« Comme dans toutes les autres hautes écoles, le nombre d’inscriptions est cependant en légère baisse depuis trois rentrées académiques », analyse Florence Orlandi, chef du département Soins infirmiers et spécialisations dans cet établissement.

La baisse d’attractivité de ces études est principalement liée à deux facteurs. D’une part, un bachelier d’une durée de quatre ans au lieu de trois depuis la rentrée de septembre 2016, sans évolution du statut ni de la rémunération à l’issue du cursus – cet allongement d’un an est dû à une directive européenne obligeant les étudiants à prester au minimum 2300 heures de stages. D’autre part, la médiatisation, pendant le Covid, de la profession et de ses difficultés : effectifs faibles, pression maximale, etc. 

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L’après Covid
Malgré ce recul des inscriptions, les responsables de département perçoivent la même tendance : les étudiants sont certes moins nombreux, mais ils sont plus motivés. « Les étudiants qui s’inscrivent aujourd’hui ont une envie plus précise de faire ce métier, contrairement à avant le Covid où certains s’inscrivaient pour essayer », constate Laurence Piron, directrice du département paramédical de la Haute École Libre Mosane (HELMo).

Même son de cloche auprès de Florence Orlandi : « On le voit aux portes ouvertes : on n’a plus autant de monde mais on sent que ceux qui viennent sont ultra motivés. On sent que ce sont des gens déjà bien informés et qui ont vraiment envie d’être infirmiers. »

Concernant la proportion des genres parmi ses étudiants, Florence Orlandi indique qu’il y a désormais « environ 20% d’hommes, contre 10% il y a quelques années » et que ceux-ci ont majoritairement tendance à s’orienter vers les urgences ou les soins intensifs.

En plus des conséquences sur le fonctionnement des hôpitaux, la pénurie de personnel médical a des répercussions sur les stagiaires qui, dans certains services, ne sont plus encadrés et formés comme auparavant. En outre, « le manque de personnel et les conditions de travail qui se sont fort dégradées créent parfois un réel manque de temps pour prendre soin des patients, alors que c’est pour ça qu’on fait ces études au départ. Ça décourage pas mal d’étudiants », regrette Florence Orlandi.

Au début de la pandémie, lorsque les stagiaires étaient particulièrement confrontés à des situations éprouvantes, les écoles supérieures ont connu un pic « des abandons en 2e , 3e et 4e années, chose très rare en temps normal » explique Laurence Piron.

Un métier relationnel et technique
Quelles sont alors les motivations des étudiants et des professionnels du secteur infirmier ? Deux éléments sortent du lot : l’aspect relationnel à tous niveaux – qu’il s’agisse du soin apporté aux patients ou des interactions au sein du personnel médical – combiné avec la complexification scientifique et technique du métier. En effet, la profession a largement évolué ces dernières décennies et on est bien loin du modèle suranné de l’infirmière soumise aux ordres du médecin, souligne Laurence Piron : « Le métier s’est identifié. L’infirmière réfléchit, pose des actes et est autonome dans ses décisions. Les études ne sont pas évidentes et sur le terrain il faut être un bon communicant et pouvoir collaborer avec les autres professionnels de la santé. »

« Tous les métiers médicaux sont importants, mais on a vraiment un rôle central », insiste Florence Orlandi, « parce qu’on est proche du patient et de sa famille, parce qu’on est le relais avec le kiné, l’ergothérapeute, le service de diététique, etc. ».

Si l’amour du métier semble nécessaire pour tenir la longueur – en raison notamment de la faible valorisation de la profession et du risque élevé de burnout lié au stress et à la charge de travail – nos deux interlocutrices rejettent en revanche le terme de « vocation », teinté d’une connotation catholique et sacerdotale. Aux antipodes du métier scientifique et spécialisé qu’est devenu la fonction d’infirmier, il évoque le cliché désuet de la religieuse œuvrant comme infirmière ou de « la servante du médecin qui courait partout après, alors que cela fait des années qu’on se bat pour avoir une profession à part entière » ironise Florence Orlandi, avant de conclure : « On doit être fier d’être infirmier et on a vraiment une place dans le monde de la santé. »

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