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L’intérim, une voie de solution pour le secteur de la construction

Rédigé par: Sarah Lohisse
Date de publication: 4 févr. 2022
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L'interim, une solution pour la construction

« Les gens qu’on recrute doivent être engagés. C’est ça le premier grand pas », défend Stéphane Dieleman, administra- teur délégué de Louis De Waele. © BELGA

La pénurie des talents est connue depuis de nombreuses années dans la construction. Aujourd’hui, c’est aussi le secteur de l’intérim qui est touché par cette même crise.

Le manque de candidats, tous secteurs confondus, est criant depuis plusieurs années. Le phénomène n’est pas nouveau, le war for talents (la guerre des talents) existe depuis déjà plus de 24 ans.

Le secteur de la construction n’est pas en reste. Alors que son marché est florissant, la fidélisation des nouvelles recrues s’avère beaucoup plus compliquée. Pour les entreprises, plusieurs solutions leur sont offertes pour engager de nouvelles personnes : trouver la perle rare sortant d’une école, former un ou une stagiaire venu(e) travailler dans l’entreprise, l’appel aux sous-traitants étrangers ou l’engagement de personnel via les agences d’intérim.

Pourtant, il semblerait que ces dernières chassent aussi dans le même vivier face à cette pénurie de talents. Chez Adecco, le groupe franco-suisse spécialisé dans l’intérim, ce sont plus de 11.500 postes qui sont vacants dans plus de 4.000 entreprises. Chez Randstad Group, ce sont 500 nouvelles recrues qui sont dans le viseur.

Une recherche de profils « engagés »

Pour Stéphane Dieleman, administrateur délégué de Louis De Waele, une entreprise de construction, rénovation et restauration, la difficulté est bien présente. La boîte compte environ 110 employés pour 90 ouvriers. Si la construction est une passion pour le CEO, il souhaite qu’elle le soit aussi pour les futurs travailleurs de l’entreprise. Pour lui, le maître mot reste « l’engagement » : « Aujourd’hui, nous cherchons à engager des gens pour avoir à la fois la maîtrise et la qualité au sein de l’entreprise. Nous travaillons parfois avec des clauses sociales, mais cela peut s’avérer compliqué, parce que l’on tombe souvent sur des personnes qui ne sont pas très motivées. Il n’y a que ça qui compte. Les gens qu’on recrute doivent être engagés. C’est ça le premier grand pas. »

L’enjeu pour les agences d’intérim est de jouer avec ces facteurs. Pour Sébastien Cosentino, porte-parole de Randstad, les demandes au sein des groupes de construction sont diverses : « On ne peut pas dire qu’il y ait vraiment un métier en particulier en pénurie, mais les métiers techniques au sein de la construction le sont particulièrement. » Les profils recherchés sont diversifiés et passent par des coffreurs, ouvriers et maçons qualifiés aux métiers de parachèvement ou liés aux techniques HVAC (ventilation, climatisation), comme les frigoristes par exemple.

Formation, formation, formation

La guerre des talents induit que le contexte devient de plus en plus compliqué pour trouver les perles rares, et ce, malgré les efforts déployés par les différentes boîtes d’intérim. « Cette situation est un élément que nous devons considérer avec le plus grand sérieux », souligne le porte-parole de Randstad. « Nous sommes un acteur important de l’écosystème du marché du travail. Nous sommes donc en obligation de nous réinventer en permanence pour pouvoir attirer, former et fidéliser nos meilleurs talents, que cela soit pour nos clients, mais également pour nous, en tant qu’employeur. »

Des outils sont donc nécessaires en termes de formation. Un point qu’appuie Sonia Frey, à la tête des RH et du management en communication externe chez Adecco : « Tout démarre de la formation, du fait de donner envie aux jeunes de se lancer dans certains domaines. C’est un travail à faire sur du long terme. »

Des formations sont également mises au point par les agences d’intérim pour tenter de redynamiser le secteur de la construction, notamment via la création de projets transversaux laissant la place à un réseau de consultants experts dans le secteur d’activité, pour apporter des réponses appropriées. Le déficit de notoriété et d’attractivité de certains métiers est aussi pointé du doigt, ce que souhaite palier les agences et les entreprises grâce à une meilleure vitrine, notamment médiatique.

Pour attirer de nouveaux talents, Adecco a d’ailleurs une nouvelle technique bien rodée : offrir des vacances all inclusive en Grèce aux (nouveaux) inscrits dans leur agence. Plusieurs personnes seront tirées au sort après la clôture de la campagne fin mars. Alors que l’agence n’avait jusqu’alors jamais enregistré une telle pénurie, elle a reçu depuis le début de l’action 15 % de CV en plus.

L’intérim, une solution partielle

Si les agences s’efforcent de travailler l’image de marque de ces métiers, le résultat n’est malheureusement pas toujours au rendez-vous pour les entreprises en recherche constante de corps de métiers. Malgré les demandes, les recrues ne sont pas souvent au rendez-vous, ou ne détiennent pas les qualités demandées. Un constat qui les pousse souvent à former elles-mêmes leurs futurs travailleurs de terrain.

« Nous avons du mal à trouver des ouvriers qualifiés en intérim, notamment parce que les profils recherchés sont déjà pris», explique Stéphane Dieleman. « Nous essayons alors d’aller chercher les recrues dans les écoles, à la source. Aujourd’hui, j’essaie d’engager des jeunes et de constituer des équipes pour qu’ils soient parrainés, pour qu’ils acquièrent de l’expérience. Il y a un manque de moyens alloués pour les formations. Les entrepreneurs essaient de se mettre ensemble pour créer des lieux où l’on va former des jeunes au sein de l’Adeb (l’association des entrepreneurs de Belgique– NDLR), qui regroupe les classes 8. Nous cherchons à avoir notre propre école. Si l’Etat ne forme pas, ce sera à nous de le faire. »

S’il confirme la pénibilité du métier, le CEO de Louis De Waele insiste : « Il faut motiver les gens, c’est un formidable métier : vous laissez des traces dans la ville. »