Le covid, un accélérateur des nouveaux modes de travail
L’organisation du travail a toujours fait l’objet de mutations, impliquant de repenser les différentes manières de travailler. Mais le covid a-t-il changé la donne pour ces «New ways of working»?
Le concept de «New ways of working», désignant ces fameux nouveaux modes de travail, investit les entreprises depuis de nombreuses années. A la Stib par exemple, cela fait maintenant dix ans qu’une réorganisation des espaces de travail a été entamée. Fini les bureaux classiques où chacun occupe un poste de travail attitré, place désormais aux bureaux dynamiques. Aujourd’hui, aucune place n’est attribuée, les collaborateurs s’installent en fonction de la tâche qu’ils ont à effectuer. Cela peut être par exemple dans une salle de réunion si le travail nécessite des échanges entre collègues, ou dans un espace plus fermé si la tâche est confidentielle ou requiert davantage de concentration. Même topo chez Proximus, où une politique de télétravail trois jours par semaine de façon facultative était déjà menée.
Autant d’exemples qui démontrent à quel point les pratiques de travail sont loin d’être gravées dans le marbre. Nombreux sont d’ailleurs ceux qui prédisent que ces nouveaux modes de fonctionnement gagneront du terrain dans les années à venir. Mais le covid a-t-il rebattu les cartes de leur progression? Que du contraire, à en croire Haroun Fenaux, Press Relations Manager chez Proximus : «D’après certaines études, le coronavirus nous aurait fait gagner quatre à cinq ans dans l’adoption des outils et des modes de fonctionnement. Du jour au lendemain, près de 85% de nos employés se sont retrouvés à travailler à distance. Grâce aux investissements que nous avons réalisés ces dernières années dans la mise en place d’un lieu de travail numérique, nous avons pu facilement faire face à ce changement soudain dans notre façon de travailler. Mais la pandémie a complètement changé la perception du travail à domicile, tant chez les employés que chez les leaders. Elle nous pousse à remettre en question la vision traditionnelle selon laquelle les gens ne sont efficaces que lorsqu’ils sont physiquement présents au bureau.» Un avis partagé par Jean-Pierre Martin, senior vice-President HR à la Stib: «La crise sanitaire a surtout été un accélérateur de changements. Avant l’arrivée du coronavirus, nous avions déjà timidement mis en place une série de choses. Mais il faut l’avouer, il y avait encore pas mal de résistance face à ces nouveaux modes d’organisation. Beaucoup estimaient que dans le télétravail, il y avait plus de «télé» que de «travail». Lorsque le confinement a été décrété, on a été forcés de s’y mettre. Et finalement, on s’est rendu compte que les choses pouvaient parfaitement fonctionner à distance d’un point de vue technologique.»
Un laboratoire de changements
Pour bon nombre d’entreprises, l’année 2020 aura été un gigantesque laboratoire à ciel ouvert de ce qui était possible en matière de nouveaux modes de travail. En l’espace d’un an, elles ont subi les changements avant de les apprivoiser, leur faisant sans doute gagner un temps précieux dans le processus d’implémentation de ces Nwow. Pour autant, ces changements n’ont pas été opérés sans difficultés. «En mars 2020, c’est un peu comme si on nous avait plongés dans la culture du bébé nageur. On nous a mis à l’eau, et nous n’avons pas eu d’autres choix que de nager pour rejoindre le bord. Cela nous a demandé de l’énergie. La nage n’a d’ailleurs pas été très harmonieuse dès le départ. Lorsque la question technologique a été réglée, nos collaborateurs ont presque trouvé agréable de pouvoir travailler depuis leur domicile. Mais très vite, la fatigue et l’isolement se sont installés. Pour nos people managers, ça a été aussi un sacré défi. Ils ont dû apprendre à gérer des équipes à distance avec un taux d’absentéisme élevé, avec des personnes inquiètes pour leur état de santé et celui de leurs proches. Nous avons mis en place toute une série d’initiatives pour pallier cela, mais c’est un modèle qui a ses limites», confie Jean-Pierre Martin.
L’enjeu de la gestion post-covid constitue également un défi de taille. Pour encadrer le retour au travail en présentiel, les employeurs vont devoir maintenant tirer les enseignements de l’année écoulée et capitaliser sur le meilleur des deux mondes. «Des réflexions importantes sont en cours au sein de la Stib. Nous essayons de déterminer la manière avec laquelle nous allons organiser le travail une fois le déconfinement annoncé. Il va falloir placer le curseur dans un monde hybride comprenant plus de télétravail tout en revenant à des contacts sociaux», affirme Jean-Pierre Martin. Un monde hybride vers lequel Proximus entend bien tendre également. «Nous voulons remettre en question le fait de venir au bureau par habitude, tout en offrant des options à nos employés. Si le travail à domicile n’est pas idéal ou n’est pas une préférence personnelle, le travail pourrait par exemple s’effectuer depuis l’un de nos bureaux régionaux, plus proche de leur domicile, tout en exploitant la puissance des technologies numériques. L’idée n’est en revanche pas de ne plus travailler en présentiel car nous sommes convaincus de la magie du contact physique entre les individus», conclut Haroun Fenaux.