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Le marché de l’emploi ralentit… mais pas les pénuries

Rédigé par: BENOÎT JULY
Date de publication: 21 mars 2023
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Un tiers des employeurs prévoient d’augmenter leurs effectifs malgré le ralentissement de la conjoncture. Tous ou presque se disent plus que jamais confrontés à la difficulté de recruter.

pénurie

Le paradoxe peut sembler cocasse : les employeurs se plaignent plus que jamais de ne pas trouver suffisamment de candidats… alors qu’ils revoient dans le même temps leurs perspectives d’embauche à la baisse. Comment expliquer cela ?

Penchons-nous dans un premier temps sur leurs perspectives de recrutement. Selon le dernier Baromètre de l’emploi de Manpower, celles-ci s’inscrivent certes en repli par rapport au trimestre précédent, et davantage encore par rapport à la même période de l’an dernier, mais elles n’en restent pas moins globalement positives…

Sur les 510 employeurs sondés fin janvier par l’entreprise spécialisée dans les services RH, 36 % prévoient en effet d’augmenter leurs effectifs d’ici la fin du mois de juin, tandis que seuls 18 % d’entre eux prévoient de les réduire, 43 % des employeurs interrogés n’anticipant aucun changement. Selon la méthodologie du baromètre, cette évolution se traduit par une « prévision nette d’emploi », soit le différentiel entre le pourcentage d’employeurs prévoyant des embauches et le pourcentage de ceux prévoyant des licenciements, toujours nettement positive, à hauteur de 18 %, bien qu’en repli de 5 points par rapport au trimestre précédent et de 16 points par rapport au 2ème trimestre 2022. 

Qu’en est-il du côté des pénuries ? Selon le même baromètre, elles sont plus que jamais à l’ordre du jour dans un grand nombre d’entreprises. Quatre employeurs sur cinq (80 %) éprouvent en effet des difficultés à remplir leurs postes vacants, et près d’un sur cinq (17 %) affirme même éprouver de « grosses difficultés » à trouver les bons profils... 

« Dans le contexte de grande incertitude qui persiste, le marché de l’emploi reste fortement sous tension » analyse Sébastien Delfosse, Managing Director de ManpowerGroup BeLux selon qui deux réalités se télescopent donc. « D’une part, les pénuries structurelles de main-d’œuvre s’accentuent, mettant en péril le développement de nos entreprises, alors que d’autre part, les employeurs doivent ajuster leurs effectifs en raison de la conjoncture économique qui reste défavorable et en raison de de l’indexation des salaires qu’ils ont dû intégrer dans leur structure de coûts. »

De quoi justifier une « prudence accrue », certes, mais pas pour autant un reflux du marché. « Les dernières projections de la Banque nationale de Belgique et de la Commission européenne, qui indiquent que le risque de récession devrait être écarté en Belgique, montrent que notre économie continue à résister aux vents contraires, et cela devrait nous permettre d’entrevoir la seconde partie de l’année avec un plus d’optimisme », assure-t-il.

> A lire : Wallonie : de plus en plus de métiers en pénurie

Le secteur IT toujours à la fête

Les employeurs des 9 secteurs d’activité sondés prévoient de créer de nouveaux emplois d’ici la fin du mois de juin, même s’ils rapportent des prévisions en recul dans sept d’entre eux par rapport au trimestre précédent. Ce sont les employeurs du secteur IT qui anticipent l’activité de recrutement la plus forte, et ce sont aussi ceux qui éprouvent les plus grosses difficultés de recrutement : 86% d’entre eux peinent à trouver les bons profils sur le marché de l’emploi. 

Les employeurs issus des soins de santé et des sciences du vivant, de même que ceux actifs dans l’horeca et la distribution (« retail »), notamment, rencontrent le même niveau de difficulté (86%). Les pénuries de main-d’œuvre restent également importantes dans la finance et l’immobilier, les services public et l’éduction, le transport et la logistique, la construction, entre autres. 

Notons enfin que, confrontés à cette dure réalité du marché de l’emploi, les employeurs accordent plus que jamais de l’importance aux « soft skills », ces qualités personnelles complémentaires au diplôme. Parmi celles-ci, ils disent rechercher avant tout, selon le sondage de Manpower, « la responsabilité/fiabilité/discipline, la résilience/adaptabilité, l’esprit d’initiative, la capacité à analyser et résoudre des problèmes, et la soif d’apprendre/curiosité ».

 « Face aux pénuries de main-d’œuvre qui frappent tous les secteurs et quasiment toutes les fonctions, les employeurs doivent plus que jamais recruter et gérer leur personnel en mettant l’accent sur le potentiel des individus plus que les diplômes », assure Sébastien Delfosse. « Cela leur permettra d’élargir leur vivier en se montrant plus créatifs dans leur façon d’attirer et retenir les talents. »