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Les embauches repartent dans les banques

Date de publication: 16 mai 2014
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Après dix années moroses, le secteur de la banque et de la finance met le turbo côté recrutement. Mais quels sont les profils les plus convoités et les postes les plus intéressants ? Réunis lors d'une table ronde par Références et Vacature, cinq experts ont répondu à  nos questions.

Décidément, le secteur bancaire n'attire plus les étudiants... Dans une étude internationale réalisée en partenariat avec Universum auprès de 108 000 étudiants dans 1 350 écoles de commerce à  travers le monde, Deloitte révélait les attentes et les choix de carrière de la nouvelle génération vis-à -vis du secteur bancaire. Entre 2008 et 2013, la banque a reculé de cinq rangs pour se placer à  la 35e place dans les choix de carrière des étudiants. Loin derrière les nouvelles technologies et la santé. Que reprochent ces jeunes aux banques ? De ne pas se préoccuper de l'équilibre vie privée-vie professionnelle, rapporte l'étude. Mais aussi de ne plus offrir suffisamment de stabilité d'emploi. Fermetures d’agences, dégraissages massifs, plans salariaux, réorganisations internes : les plans de restructuration se sont succédé ces dernières années et les transformations à  l'œuvre ne sont certainement pas terminées. Ce qui pousse les étudiants à  considérer la banque davantage comme un tremplin professionnel que comme une entreprise où ils réaliseront une longue carrière.

Fusions et crise financière, mais aussi évolutions technologiques ont non seulement diminué les besoins en ressources humaines, mais aussi modifié le profil du personnel occupé. On compte aujourd'hui plus de cadres et moins d'employés que par le passé. Pour les opérations simples, les machines remplacent les guichetiers. L'une après l'autre, les banques se sont mises à  l'heure du digital. Ce qui les pousse aussi à  revoir l'essence même de leurs agences « physiques ». Mais, bonne nouvelle pour ainsi dire, le métier de banquier devient de plus en plus complexe et est soumis à  des contraintes de plus en plus lourdes (Solvency II, Bâle III, etc.). Ce qui veut dire aussi que le secteur engage : en moyenne 4 000 personnes par an.

Pourquoi ça recrute encore ?

Le recrutement externe des grands acteurs du secteur bancaire a été divisé par deux entre 2007 et 2013. Au cours de la décennie écoulée, près de 15 000 emplois ont disparu. Cette page est-elle en train d'être tournée ? Même si elles sont encore engagées dans une terrible chasse aux coûts, les banques continuent de recruter. Alors certes, elles regroupent des agences, se réorganisent et jouent encore à  fond la carte de la mobilité interne, mais depuis quelques mois, elles semblent rouvrir leurs portes à  des candidats externes. On est essentiellement sur un marché de remplacement des départs en retraite et du turn-over naturel, mais aussi sur des recrutements par anticipation. Les banques doivent s'entourer de talents pour éviter des trous dans leur pyramide des âges, observe David Ramakers, Managing Partner chez Dynafin Consulting. Les grands réseaux continuent d’embaucher des jeunes ainsi que des experts. Le secteur offre toujours des possibilités diversifiées d'évolution et de formations, ainsi que des perspectives encore plus internationales qu'auparavant. Mais la réalité du monde bancaire a changé : le focus est désormais moins placé sur les fonctions opérationnelles que sur les fonctions commerciales, les fonctions informatiques, les fonctions régulatoires et les fonctions d’expertise, ajoute-t-il. Après avoir embauché entre 7 000 et 8 000 personnes par an, le secteur devrait donc recruter entre 2 000 et 4 000 nouvelles personnes cette année.

Qui embauche ?

Le marché de l’emploi reste encore majoritairement tiré par les grands réseaux bancaires. Ainsi, la banque ING Belgique mise sur 300 recrutements cette année. Les jeunes continuent à  être recrutés en grand nombre. Mais nous engageons aussi des profils plus expérimentés, confie Muriel Malak, directrice du recrutement chez ING. Son concurrent, BNP Paribas Fortis table sur environ 500 recrues dont la moitié de jeunes diplômés. Actuellement, un sixième de notre personnel a plus de 55 ans et un tiers a plus de 50 ans. Dans les prochaines années, il y aura des départs massifs à  la retraite. Et nous devons dès à  présent préparer la relève, détaille Yves Lievens, responsable RH pour la division Entreprises chez BNPPF. À côté de ces deux locomotives, CBC, la branche francophone du groupe KBC, envisage aussi de recruter 70 personnes pour renforcer ses équipes commerciales. Nous n'avons jamais stoppé nos recrutements. Mais nous préférons prendre le temps de trouver des baccalauréats et des masters qui correspondent au secteur bancaire pour éviter les erreurs, souligne Delphine Cotteaux, responsable du développement RH chez CBC. Enfin, les fusions-acquisitions ont aussi donné naissance à  de nouveaux acteurs. Certes, plus petits, mais avec des approches innovantes, qui sont synonymes de recrutements.

Ainsi, la banque Crédit Agricole a repris Centea en juillet 2011 et elles ont fusionné en avril 2013 pour devenir la banque Crelan. 
À la suite de cette fusion, des informaticiens supplémentaires ont dû être engagés : sur un très court terme, 51 informaticiens ont renforcé le département ICT, précise Marleen Van Gompel, responsable conseil au personnel et formation. Actuellement, la banque Crelan porte toujours un intérêt particulier aux profils informatiques et commerciaux. Tout comme les grands réseaux, Crelan vise aussi sur la mobilité interne. De longues carrières existent encore au sein des banques, car il est tout à  fait possible de passer d'une fonction à  une autre au sein d'une même entreprise.

Quels profils sont recherchés ?

Dans la banque, les informaticiens sont souvent à  l'honneur, car ils représentent les volumes de recrutements les plus importants. Mais il n'y a pas qu'eux : les recruteurs recherchent aussi des commerciaux et des spécialistes avec des expertises parfois rares, parfois très pointues. Des candidats formés, opérationnels, fiables et agiles... Afin d’éviter les erreurs de casting, les établissements prennent un maximum de précautions dans leurs recrutements. Pourtant, le métier de banquier ne se rend pas très visible : un guichet, des bureaux, un rendez-vous comme chez le médecin ou l'avocat, bref, un environnement tertiaire dont on voit peu la face cachée et qui est globalement reproduit à  l'identique ou presque d'une marque à  l'autre... Dès lors, les recruteurs cherchent aussi faire preuve de transparence. Ils sillonnent les campus, participent aux bourses d'emploi, organisent des job days, investissent dans les stages. Nous recrutons beaucoup de business et IT developers dans le monde de la banque digitale, mais aussi des experts en affaires réglementaires, en audit et compliance. Les commerciaux aussi sont très recherchés, notamment pour le private banking et les fonctions de conseil, explique Yves Lievens de BNP Paribas Fortis. Selon la pyramide des âges et l’organisation du réseau, les banques recrutent plus ou moins de cadres juniors : 70 % chez BNP Paribas contre 25 % au sein de BPCE. Nos besoins changent très vite. Dès lors, nous n'engageons pas seulement des candidats « plug & play » dans une fonction, mais aussi du personnel capable de se développer pour être opérationnel dans un nouveau rôle. La curiosité intellectuelle est la clé, illustre Muriel Malak du groupe ING. Une tendance que confirme Marleen Van Gompel de la banque Crelan : Nous avons autant besoin de professionnels généralistes que de spécialistes, car la complexité de certaines fonctions ne cesse d'augmenter. Mais une des grandes évolutions dans le monde bancaire, c'est aussi le passage de structures très hiérarchisées au travail en mode projet. Dans ce contexte, les recruteurs attachent beaucoup d'importance à  l'autonomie des candidats et à  leur capacité à  travailler en équipes multidisciplinaires. Le mode de management est plus participatif que dans le passé. Aujourd'hui, une des caractéristiques des candidats que nous recrutons, c'est aussi leur intelligence émotionnelle. Nous attachons de l'importance à  la manière avec laquelle ils peuvent créer une dynamique d'équipe et, plus individuellement, à  oser, illustre Delphine Cotteaux, de CBC Banque. Les commerciaux, chargés de clientèle particuliers, professionnels, gestionnaires de patrimoine... sont de nouveau très prisés. Les grands réseaux espèrent une reprise, ils recherchent donc des candidats spécialisés pour vendre leurs produits de plus en plus techniques, explique David Ramakers, Managing Partner chez Dynafin Consulting. Le développement des banques en ligne favorise également l’émergence de postes en lien avec les usages bancaires numériques. Enfin, du fait de leur pyramide des âges, les institutions financières vont connaître d'ici à  2020 de grands changements générationnels. Elles vont devoir recruter de nombreux jeunes issus des générations montantes. Ces digital natives, particulièrement connectés, représentent un sérieux défi mais surtout une formidable opportunité pour les réseaux traditionnels. La demande est de moins en moins axée sur les fonctions que sur le rôle, voire le type de business, observe David Ramakers. Aujourd'hui, les employeurs recherchent une forme d'agilité chez leurs collaborateurs. Pour qu'ils puissent, à  terme, acquérir et développer de nouvelles compétences sur le terrain.   

Que sera la « banque de demain » ?

Les choses vont vite, dans l'univers des nouvelles technologies. Très vite. Les banques en ligne commencent à  peine à  menacer les réseaux bancaires traditionnels que les voilà  déjà  passées de mode - ou presque -, au profit des banques dites mobiles. C'est que les comportements des consommateurs changent à  vitesse grand V, eux aussi. En 2003, un tiers environ des contacts entre les clients et leur banque s'effectuait en agence, le solde se répartissant de manière équitable entre appels téléphoniques et consultations du site internet de l'établissement. Dix ans plus tard, c'est via le mobile que les consommateurs entrent en relation avec leur banque, dans 50 % des cas environ. Toutes les banques se sont mises à  l’heure du digital, constate Muriel Malak du groupe ING. L'idée étant de faciliter l'accès à  l'utilisateur. Mais nous restons une banque universelle et avons l'intention d'investir dans les agences. Et donc, les profils commerciaux. Car le client apprécie plus que jamais le conseil individualisé qu'il peut y trouver. Pour l'heure, l'enseigne termine d'équiper 500 de ses spécialistes de terminaux portables leur permettant « d'amener l'agence au domicile des clients ». Chez BNP Paribas Fortis, l'approche se veut plus multicanal que jamais. Bien sûr, nous développons des services pour toutes sortes de clients, à  travers le numérique, les call centers, etc. Mais les agences physiques continuent à  jouer un rôle central, explique Yves Lievens de BNP Paribas Fortis. Parce que les clients sont envahis d'informations et, à  un moment, ils ont besoin de conseils personnalisés. D'un vrai moment de vérité. En avril, l'enseigne a annoncé la transformation de 300 à  350 agences en « bureaux de conseil » fonctionnant uniquement sur rendez-vous l'après-midi. L'accent est également mis sur le service et le contact client chez CBC. Les agences ne disparaissent pas. Parce que toute la clientèle ne suit pas avec la même ardeur la révolution « digitale ». Dès lors, nous sommes assez balancés dans les profils que nous cherchons : on a besoin de personnes sensibilisées aux nouvelles technologies, mais avec un côté traditionnel et rassurant pour le client, explique Delphine Cotteaux de CBC Banque. Dans la transformation inévitable des modes de relation client-banquier, le numérique est pourtant un puissant levier : en partageant un même écran, en téléchargeant et en découvrant ensemble une appli, le conseiller et son client peuvent se rencontrer… autrement. Tout l'enjeu de la digitalisation du métier de banquier se situe donc aussi là . La banque qui réussira à  mieux les intégrer, à  « donner vie au digital » dans l'agence et non seulement à  côté, c'est-à -dire online, aura sans nul doute un coup d'avance. Malgré l’évolution du secteur, la banque reste un métier de service, conclut David Ramakers de Dynafin Consulting. L'orientation client, la gestion de projet et le sens du résultat sont parmi les compétences les plus recherchées chez les banquiers. Et quel que soit le niveau de fonction, les organisations cherchent surtout des gens passionnés par le métier.

 

Qu'est-ce qu'un job dans la banque en 2014 ?

Muriel Malak, directrice du recrutement chez ING

« Ces dernières années, le secteur est passé par une crise, mais il est à  nouveau solide. Heureusement, les États ont légiféré en temps et en heure. Et une série de garde-fous ont été imposés pour rassurer. Plus que jamais, notre métier consiste à  vendre de la confiance. Le secteur est à  nouveau solide. Et quand les jeunes font le choix de nous rejoindre, ils le font avec conviction. C'est un secteur qui offre plein de possibilités, des carrières diversifiées. La curiosité intellectuelle est la clé du développement personnel de nos collaborateurs. »

Delphine Cotteaux, responsable du développement RH chez CBC

« Notre positionnement, c'est d'être un acteur local. Nous sommes le partenaire des indépendants, des professions libérales et des PME. C'est cet état d'esprit que nous souhaitons retrouver chez nos candidats. Nous veillons aussi à  ce qu'ils aient un ancrage dans des confédérations locales, dans des projets associatifs, communaux ou liés au monde économique. L'esprit de communauté est la clé de notre approche : nous avons un management participatif et privilégions l'esprit d'équipe. »

Marleen Van Gompel, responsable staff advice & training chez Crelan

« Le secteur bancaire a beaucoup évolué. Pour les jeunes qui ont entrepris des études dans le domaine, il y a de belles ouvertures. Tant sur le plan commercial qu'intellectuel. Ces dernières années, nos recrutements se sont beaucoup concentrés sur les profils ICT. Mais nos besoins portent aussi sur des métiers spécialisés, comme le risk & compliance. La complexité de certaines fonctions augmente. Et chacun peut devenir partie prenante des enjeux du secteur. »

Yves Lievens, responsable RH pour la division Entreprises chez BNP Paribas Fortis

« Même si le monde change énormément, la banque s'adapte. Mais le métier de base reste toujours le même : le banquier doit rester proche de l'économie locale. Le plus important est d'aider le client à  réaliser son rêve. Notamment à  travers des conseils de plus en plus spécialisés. C'est pourquoi les agences continuent de jouer un rôle central, à  côté d'une multitude de nouveaux canaux, qui répondent aux besoins spécifiques de la clientèle. »

David Ramakers, Managing Partner chez Dynafin Consulting

« Le changement que traverse le secteur devient un critère d'attractivité. Aujourd'hui, des profils pointus, reconnus pour leur expertise, peuvent s'épanouir dans différents types de fonctions. Car les employeurs semblent avoir tourné la page de la morosité : ils investissent dans l'individu, l'ambiance au travail, et multiplient les défis au sein des fonctions. Ils offrent des horaires flottants, permettent de travailler à  l'extérieur et flexibilisent même les rémunérations. »

 

4 métiers au cœur du marché bancaire

Conseiller en gestion de patrimoine

C’est quoi le job ? Il s’agit de piloter la gestion des placements des clients. Après avoir établi un bilan patrimonial (financier et foncier), ce conseiller définit une stratégie d’investissement en fonction des différentes règles juridiques et fiscales en vigueur.

Quel profil faut-il ? Il faut être un bon commercial, mais aussi être rompu à  l’évolution rapide des différents produits techniques et défiscalisant. Donc, c’est à  la fois un job de technicien et de vendeur. Les diplômés en gestion de patrimoine sont évidemment les candidats idéals. Ces postes sont aussi accessibles après des expériences de chargés de clientèle particuliers ou entreprises ou une expérience sur les marchés financiers. Un bon gestionnaire de patrimoine peut évoluer comme gestionnaire de fortune.

Compliance Officer

C’est quoi le job ? C’est le garant de la bonne application opérationnelle de la réglementation bancaire, notamment dans les banques d’investissement. Sa mission principale est de détecter les transactions suspectes. Il doit par exemple vérifier l’origine des fonds, l’identité de l’émetteur ainsi que la cause du transfert. En interne, il forme et conseille le management sur ces sujets éthiques.

Quel profil faut-il ? Essentiellement des candidats expérimentés ayant à  la fois des compétences juridiques, business et de bon communicant. En interne, le Compliance Officer peut parfois être perçu comme l’empêcheur de tourner en rond. Il doit donc faire preuve de pédagogie et de communication pour être respecté et efficace.

Chargé de clientèle professionnelle

C’est quoi le job ? Il s’agit d’accompagner au quotidien les artisans, commerçants et professions libérales dans la gestion et le développement de leur entreprise. C’est le chargé de clientèle qui peut accorder des facilités de caisse à  l’artisan, monter des dossiers de crédit, effectuer des opérations de placements… Au quotidien, c’est l’un des « bras droits » du chef d’entreprise.

Quel profil faut-il ? Être diplômé d’une école de commerce ou d’un master spécialisé en banque. Les commerciaux de niveau bac+2/3 dotés d’une première expérience comme chargé de clientèle particuliers peuvent aussi prétendre à  ce type de poste. Les candidats doivent avoir le goût du terrain, car cela nécessite beaucoup de présence chez les clients. Ce poste est souvent un bon tremplin vers un job de directeur d’agence.

Informaticien

C’est quoi le job ? Il n’y a évidemment pas un seul type de poste d’informaticien dans les banques, mais des dizaines en fonction des secteurs. En tout cas, tous ont un même but : assurer la sécurisation des paiements et des échanges de données en ligne. Selon sa spécialisation et la stratégie de la banque, l’informaticien bossera sur la banque en ligne, la sécurité informatique, dans une salle de marché… Plus que jamais, l’informatique est le nerf de la guerre dans les secteurs bancaires et financiers.

Quel profil faut-il ? Pas le choix, il faut être ingénieur ou titulaire d’un bac +4/5 en informatique. Ou plus rarement, maîtriser parfaitement les mécanismes financiers et se former en informatique en interne. À noter que les banques embauchent également parfois une partie des consultants des SSII avec lesquelles elles travaillent.