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Quand le travail fait mal, mieux vaut prévenir que guérir

Rédigé par: CAROLINE DUNSKI
Date de publication: 21 mars 2023
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Une des principales causes du burnout est actuellement la multiplication des conflits éthiques dans les lieux de travail, c'est-à-dire le fait de ne pas pouvoir réaliser son travail comme on le voudrait, un travail dont on peut être fier et qui est en cohérence avec ses valeurs.

burn out

L’Association bruxelloise pour le bien-être au travail (ABBET) a pour mission d’informer, de sensibiliser et d’accompagner les associations dans la mise en œuvre du bien-être au travail. A ce titre, elle s’intéresse au burnout, phénomène croissant ces dernières années dans le secteur non-marchand. Le point avec Coline Roulin, psychologue de formation, conseillère en prévention.

Comment fondamentalement définir le burnout ?

C’est un processus, longtemps invisible et silencieux pour la personne qui le vit, dans lequel le corps et l’esprit tentent de tenir dans un contexte de stress au travail. C’est une suradaptation dans la durée qui fait que, physiologiquement, à un moment, le corps lâche, alors que le mental veut aller jusqu’au bout. La manifestation est souvent brutale : impossibilité de quitter son lit, un acte agressif au travail… Une des principales causes du burnout actuellement est la multiplication des conflits éthiques dans les lieux de travail, c'est-à-dire le fait de ne pas pouvoir réaliser son travail comme on le voudrait, un travail dont on peut être fier et qui est en cohérence avec ses valeurs. C’est l’interaction entre l’individu (sa personnalité, son rapport au travail, ses attentes, etc.), son environnement de travail (où il peut y avoir un manque de moyens, de temps, de soutien collectif, etc.) au sein même d’un contexte sociétal particulier (rentabilité, culture du chiffre, etc.) qui explique le risque de burnout.

Quelles sont les différences entre préventions « primaire », « secondaire » et « tertiaire » du burn-out ?

La prévention primaire vise à agir en amont, afin d’éviter des situations pouvant mener au burnout. Il s’agit de mettre en place des mesures organisationnelles afin de préserver la santé psychique et physique des travailleurs pour qu’ils puissent réaliser un travail de qualité, tant pour eux-mêmes, que pour l’institution et les bénéficiaires. Dans ce premier volet de la prévention, il est important de tenir compte du collectif de travail en fournissant, par exemple, un espace où les travailleurs peuvent se réunir, où les rôles et responsabilités de chacun sont définis, où les règles et les procédures de travail sont clarifiées. Il s’agit aussi de fournir les moyens nécessaires et suffisants pour réaliser le travail. 

La prévention secondaire consiste à mettre des mesures de protection en place dès que les premiers signes de burnout sont détectés. On peut, par exemple, mettre en place des intervisions, des supervisions d’équipe, mais aussi réajuster la charge de travail si elle est jugée trop lourde, etc. 

La prévention tertiaire a pour but de limiter les dommages physiques et psychiques des travailleurs touchés par le burnout en fournissant, par exemple, un accompagnement et un soutien psychologique, en réaménageant le poste de travail ou en modifiant le descriptif de fonction. 

> A lire : 3 conseils pour éviter le burn-out

Comment détecter les cas individuels de risques avant qu’il ne soit trop tard ?

Il n’est pas facile de les repérer, tant pour la personne qui le vit que pour son entourage. Toutefois, certains signaux peuvent alerter sur le risque de développer, à un moment donné, un épuisement professionnel. Par exemple, lorsqu’une personne est dans une phase prolongée d’hyperactivité, qu’elle donne davantage d’efforts en étant de plus en plus fatiguée. Dans ce cas, la personne puise dans ses ressources sans pouvoir recharger ses batteries. Il y a aussi d’autres signaux d’alerte : l’apparition de douleurs physiques sans causes mécaniques, des troubles du sommeil (ruminations, réveils nocturnes, etc.), des réactions émotionnelles disproportionnées (colère, crise de larmes, etc.), des changements d’humeur, la consommation de produits qui permettent de tenir (substances naturelles, boissons énergisantes, antidépresseurs, etc.). De plus, ne plus prendre de plaisir à travailler est aussi un signal d’alerte important.

La responsabilité est-elle individuelle ou systémique (de l’entreprise) ?

Souvent, on a tendance à rejeter la responsabilité sur l’individu et son rapport au travail. Les solutions proposées sont souvent d’ordre individuel – apprendre à « gérer son stress », module sur « l’affirmation de soi », etc. – sans agir sur les facteurs organisationnels qui permettraient de prévenir collectivement le burnout. Or, les associations doivent penser l’environnement de travail pour qu’il soit adapté au travailleur et, donc, faire de la prévention primaire pour éviter les situations d’épuisement. La responsabilité est aussi sociétale : la culture du chiffre et la marchandisation dans laquelle nous sommes engendrent beaucoup de mal-être psychique au sens large.