Sandrine Dixson-Declève : « Une croissance juste, ce n’est pas la croissance d’aujourd’hui »

Pour la coprésidente du Club de Rome, il faut saisir l’opportunité de la transition pour repenser notre modèle économique. « La croissance actuelle crée de l’inégalité. La croissance juste est, au contraire, axée sur le bien-être », estime-t-elle.

Interview Sandrine Dixson-Declève

Voyez-vous la transition climatique comme une opportunité ?

La transition climatique est non seulement une opportunité, mais elle est absolument nécessaire. Il faut mettre en place les technologies et les plans pour amener les citoyens avec nous, les réglementations nécessaires aussi pour les protéger. C’est une opportunité parce que je ne crois pas que l’économie aille bien; beaucoup de citoyens dans le monde entier disent que l’économie ne va pas bien. La transition est donc une opportunité de faire autrement, de créer des communautés beaucoup plus solidaires autour d’une énergie plus efficace, d’optimiser nos systèmes de mobilité, de penser à changer notre façon de consommer.

Faut-il faire une pause dans la réglementation ou, au contraire, l’accélérer ?

Il y a des législations qui ont été créées pour décarboner et pour protéger la nature, et il faut les deux. Mais il faut aussi éliminer les perversités qui existent dans le marché, les réglementations qui ne fonctionnent pas, les subsides qui sont donnés à l’énergie fossile et qu’il faudrait remplacer par de l’aide pour les énergies renouvelables, pour qu’on ne voie pas d’augmentation de coût pour le citoyen. Il faut aussi réfléchir à une agriculture qui nourrit les citoyens tout en coûtant moins cher et en restant dans un système régénérateur. Une législation qui continue à protéger ce qu’on veut au niveau de nos objectifs climatiques et de la protection de la nature est essentielle parce que nous faisons partie de la nature. Si on continue à voir une dégradation de celle-ci, nous aurons un impact direct sur nous-mêmes, au niveau de la désertification, des inondations…

Interview Sandrine Dixson-Declève 2

Quelle mesure vous vient-elle en tête quand on évoque une « croissance juste » ?

Une croissance juste, ce n’est pas la croissance qu’on a aujourd’hui, qui remplit les poches des plus riches et pas des plus pauvres. Une croissance juste n’est pas fondée uniquement sur la productivité ni sur une économie extractive qui, pour finir, ne donne pas accès à ce qui est essentiel pour les plus vulnérables de nos sociétés. La croissance actuelle crée de l’inégalité. La croissance juste est, au contraire, axée sur le bien-être. Beaucoup d’économistes du monde entier travaillent à la confection d’indicateurs qui placent une valeur sur le capital humain, sur le capital social, sur le capital environnemental, et pas que sur la productivité.

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